23 août 2018
Travailler dans les mines, c’est aussi pour les femmes
Originalement publié sur Jobillico le 15 juin 2018
L’industrie des mines profite d’une forte diversité de minéraux et de métaux enfouis dans le sol du Québec. Cette situation fait même de la province l’une des plus actives dans le secteur au Canada!
Si on a longtemps eu l’impression que les mines étaient un milieu de travail pour les hommes costauds en quête d’un métier de bras, la réalité est maintenant tout autre. Aujourd’hui, les mines embauchent une grande diversité de travailleurs, mais aussi de travailleuses.
C’est pourquoi Jobillico a rencontré Jessica Salois-Rivard, arpenteuse principale à la mine Westwood, près de Rouyn-Noranda, afin d’en savoir plus sur les emplois dans les mines et la place des femmes dans ce milieu.
Parlez-nous de votre travail d’arpenteuse principale à la mine Westwood.
Mon travail consiste à superviser, ou plutôt coordonner, l’équipe d’arpenteurs de la mine. C’est moi qui divise l’équipe dans les galeries, j’organise le temps et les déplacements de l’équipe, je m’assure que les aspects santé et sécurité sont connus et respectés de tous… Bref, je suis un peu une chef d’équipe! S’il y a des commandes en matériel à faire, c’est aussi ma responsabilité. Je m’assure aussi d’établir des standards de travail pour l’équipe d’arpenteurs et de tenir les différentes procédures à jour.
Je fais aussi de l’arpentage sur le terrain pour combler certains besoins.
À quoi ressemblent vos journées de travail?
La journée d’une femme qui travaille dans les mines c’est une chose, mais la journée d’une maman qui travaille dans une mine, c’est vraiment une autre aventure!
Je me lève habituellement vers 5h30 tous les matins avant de réveiller mon fils de 6 ans à 5h40. 30 minutes plus tard, on est déjà chez la gardienne et moi je pars vers la mine. J’arrive sur le site habituellement vers 6h45.
Quand j’arrive au travail, je consulte le cartable des contremaîtres pour être au courant de ce qui s’est passé pendant la nuit et vérifier s’il y a des demandes pour mon équipe. Il se passe beaucoup de choses le soir et la nuit dans la mine, et je dois en être au courant pour bien planifier la journée des arpenteurs. Ensuite, je revois la planification du jour pour m’assurer que tout est en ordre et j’assiste aux réunions du matin avec une trentaine d’autres travailleurs pour aborder différents points liés à la sécurité pour la journée.
Après la rencontre, je me change, je prépare mon équipement et j’embarque dans l’autobus qui va me mener à l’entrée de la mine. Avec mon équipe, on descend sous terre et on va retrouver le véhicule que l’on avait laissé la veille pour se rendre à chacun de nos points de travail.
Vers midi, je remonte à la surface, je prends une douche et je dîne. Ensuite, je débute la création des plans selon le travail effectué par les arpenteurs en matinée. Comme on a des ordinateurs sous terre, mes collègues peuvent m’envoyer leurs données pour que je les traite. De cette façon, ils peuvent poursuivre leur travail et on ne prend pas de retard sur la production des plans. Notre travail de jour est très important pour l’équipe de nuit, alors tout doit être terminé pour 16h, l’heure à laquelle on quitte la mine pour retourner à la maison. Mais chaque journée est différente! On a toujours des surprises et des problèmes à résoudre. C’est vraiment un environnement de travail diversifié.
Est-ce que c’est difficile de concilier la vie de famille et la vie de travailleuse dans une mine?
Les mines, c’est le matin que ça se passe. Passé 8h, t’as tout simplement manqué le bateau! C’est certain que ça doit être un peu difficile pour mon fils qui préfèrerait sans doute dormir plus longtemps le matin, mais c’est vraiment ce que j’aime faire. Dans quelques années, je sais qu’il sera plus autonome, alors ce sera moins difficile.
Pour l’instant, on s’adapte! Je ne pourrais pas faire un métier de bureau avec un horaire plus standard. J’ai besoin de bouger, d’être dans l’action, et mon métier d’arpenteuse principale me permet tout ça!
Quel a été votre parcours scolaire et professionnel avant aujourd’hui?
J’ai d’abord fait une technique en environnement, et j’ai ensuite travaillé dans un laboratoire. Même si j’aimais plusieurs de mes tâches, je le savais que je n’étais pas une fille de bureau. C’est en faisant des analyses pour des mines que j’ai découvert le milieu et j’ai vraiment été intriguée. Je suis donc retournée aux études pour faire un DEC en technologie minérale.
Au départ, je n’avais aucune idée de ce que c’était, travailler dans une mine! Mais le programme du Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue m’a vraiment permis d’explorer toutes les facettes du milieu. L’image qu’on a souvent en tête d’un travailleur de mine c’est souvent un monsieur bâti, qui n’a pas froid aux yeux, et qui s’en va casser de la roche. Mais c’est tellement plus que ça! Il y a du travail pour une foule de corps de métier, comme des ingénieurs, des soudeurs, des électriciens, des mécaniciens… c’est pas juste des jobs de bras, c’est aussi beaucoup des jobs de tête!
Ça fait environ 6 ans que je suis à la mine Westwood. J’ai d’abord fait ma place en tant qu’arpenteuse. C’est habituellement la porte d’entrée des techniciens, le métier d’arpenteur. Ce genre de poste te permet de connaître une mine de fond en comble! Dans mon cas, je suis restée accrochée là! Pour moi, ce poste c’est le meilleur des deux mondes; j’aime être sous terre, mais j’aime aussi être à la surface!
Comment c’est, être une femme et travailler dans les mines?
Les femmes sont vraiment bien intégrées. Il n’y a pas de différence entre les attentes envers les employés masculins et celles envers les employées féminines. Aucun sexisme non plus!
Les employeurs sont aussi très compréhensifs. On le sait, ce sont souvent les femmes qui font le plus de concessions pour la famille, comme prendre congé quand l’enfant est malade. La conciliation travail et vie de famille est facile dans le domaine des mines.
Les femmes ont aussi accès aux mêmes opportunités que les hommes. On peut penser que les femmes seraient limitées dans le domaine étant donné qu’on est physiquement moins fortes ou moins grandes. Mais, aujourd’hui, l’automatisation et la technologie font qu’on a accès à une foule d’outils qui facilitent l’exécution des tâches plus physiques. Chez Westwood, on a dans l’équipe, entre autres, des géologues, des soudeuses, une ingénieure électrique, une ingénieure minière et une chauffeuse de wagons de train.
Même si elles sont en minorité, les femmes ont vraiment leur place dans les mines.
D’après vous, pourquoi y a-t-il si peu de femmes qui travaillent dans les mines?
Je crois que c’est un domaine qui attire tout simplement moins les femmes. Mais, je crois aussi qu’il y a une grande méconnaissance du milieu. Les gens vont dire que les filles qui vont travailler dans ce domaine sont des « tomboys », mais ce n’est pas toujours le cas. Évidemment, pour travailler sous terre, il faut avoir une bonne forme physique et, dans certains cas, être capable de tolérer la chaleur. Il fait environ 25 degrés à l’année sous terre dans certains secteurs de Westwood! Mais même des hommes ont de la difficulté à travailler dans ces conditions. Chose certaine, celles qui font le cours pour devenir mineuses ou soudeuses ont ça dans le sang. Ce sont des fonceuses qui prennent leur place et qui adorent les défis!
Que diriez-vous aux jeunes qui ont un intérêt pour le secteur minier?
Je leur dirais que s’ils sont à la recherche d’un milieu de travail dynamique qui sort de l’ordinaire, c’est vraiment le bon endroit! Le secteur minier est un domaine avec beaucoup d’ouvertures et de possibilités d’avancement. Une fois que tu connais les aspects d’ingénierie reliés aux mines, tu as le choix de te spécialiser dans l’une des nombreuses branches. Ensuite, il n’y a aucune limite! Tu peux commencer dans le domaine en tant qu’arpenteur et finir dans un poste de direction! En plus, comme il y a une pénurie de main-d’œuvre dans le secteur, c’est très facile de se placer après ses études.
Les mines sont très compétitives par rapport aux conditions de travail. Les salaires offerts sont très intéressants. Par exemple, selon CSMO Mines, le salaire moyen d’un technicien en arpentage minier est de 67 000$ par année. Il y a aussi de très bons programmes d’assurances et de régimes de retraite. Chez IAMGOLD, mon employeur, ont a même un régime d’achat d’actions, un programme pour l’achat d’appareils informatiques, un autre pour rembourser les frais de conditionnement physique… Les entreprises du domaine des mines sont vraiment des employeurs de choix.
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